Interview : Pauline Pham, pragmatisme et investissement.

Publié le 05/09/2022

Interview : Pauline Pham, pragmatisme et investissement.

Avant d'être Pauline de Crowdcube, puis plus récemment, de Snowball, qui est Pauline ?

Une banana girl pour sûr ; car ce métissage n'a pas été simple tout le temps, mais je crois être parvenue à le transformer en super pouvoir. Il m'a aidé à regarder les choses sous plusieurs angles ce qui est très utile pour trouver des solutions rapidement, il m'a aussi aidé à développer une philosophie de l'action, car pour prouver que "tu mérites" et que "tu appartiens", et bien, il faut '"faire" et le montrer ! 

Je suis aussi une littéraire assumée. C'est mon autre super pouvoir. J'ai souffert des fois où l'on m'a disqualifié car je n'avais pas fait une école d'ingé, mais je vois aujourd'hui que mes réussites sont le fruit de cette passion que j'ai pour les sciences "molles" comme on dit. Un produit ou un service marche si et seulement s'il rencontre son audience ; or la socio, la philo, l'éco sont des outils indispensables pour comprendre quels sont les besoins des gens et évaluer s'ils sont prêts à payer. Ce sont mes meilleurs outils en stratégie et exécution business. 

Enfin, je suis un profil très business ops - ce qui veut dire pragmatique en français. J'ai besoin de faire pour aboutir à ma pensée. Un de mes mantras, que j'ai volé à Stripe, est sans surprise "be macro optimist and micro pessimist". 

 

Pourquoi t'être intéressé à la finance ?

Parce que j'ai fait de la philo, de l'éco et de la socio, et comme le dit Yuval Noah Harari dans Sapiens : "l'argent est la croyance la plus partagée dans le monde". Or, je souhaite contribuer à ma mesure à combattre les injustices et les inégalités. 

Comme je suis une pragmatique, j'ai décidé de le faire en travaillant à rendre "la finance" plus accessible à tous. Il est important de désacraliser la figure de la finance, pour que nous soyons tous plus en prise sur le sujet. 

 

On imagine souvent le monde de la finance en costume-cravate. Raconte-nous ton expérience ? Comment as-tu réussi à faire ta place ?

Je n'ai jamais été intéressée par l'argent pour l'argent. D'ailleurs, comme pour beaucoup je pense, parler d'argent était plutôt tabou dans mon entourage. Donc je n'ai jamais eu la sensation d'appartenir à ce monde. 

En revanche, je l'ai beaucoup observé, j'ai souffert de ses pratiques parfois, mais j'ai surtout réalisé que ces outils sont nécessaires pour répondre aux défis de notre monde et de notre planète dès aujourd'hui. 

 

Es-tu, toi aussi, à titre personnel, une sérial investisseuse ?

Plus investisseuse que serial, même si bien sûr, tout est relatif ! J'investis avant tout par rapport à mes valeurs et mes objectifs de vie, et j'aurais aimé qu'on m'apprenne à investir au même moment où l'on m'a appris à épargner. Car l'un ne va pas sans l'autre. 

Je recherche à comprendre ce dans quoi je mets mon argent, si je ne comprends pas et/ou qu'on ne sait pas me l'expliquer correctement, je passe mon tour. 

 

Seules 23% des femmes investissent aujourd'hui... selon toi, pourquoi sont-elles frileuses à l'idée d'investir ?

Parce qu'on leur a appris à le devenir.

Déjà que l’on n'a pas appris à tous les hommes à être à l'aise à l'idée d'investir, donc, il est évident que les femmes se sentent encore moins légitimes ou curieuses du sujet. 

On pensait que la technologie et l'innovation allaient changer ça, mais elle continue d'être faite, à majorité, par des hommes plutôt blancs. Or, le propre de l'humain est de faire par rapport à son expérience. Aussi, ces produits et services continuent d'être conçus par rapport à leur expérience "à eux", d'où une certaine reproduction. 

 

Pour toi, quel est LE meilleur conseil pour une personne qui souhaite investir ?

Se dire que ce n'est pas une science occulte inaccessible, que ce n'est pas forcément être un trader que d'être un bon investisseur, que ça ne veut pas dire vouloir devenir riche à tout prix et que l'on peut commencer d'investir à partir de quelques euros en poche. 

Se dire aussi que c'est un outil essentiel pour être indépendante. 

 

Après la création de crowdcube en France, maintenant tu rejoins Yoann Lopez de snowball, as-tu d'autres projets en vue ?

Trouver un moyen de planter plus d'arbres à Paris et dans toute la France, et pas un truc où tu plantes un arbre en achetant quelque chose, car on sait que la plupart de ces programmes sont des désastres écologiques. 

D'ailleurs, si des gens prennent part à des initiatives, je suis preneuse car j'ai fait chou blanc jusque-là. 

 

Et enfin, si tu avais un super pouvoir, ce serait quoi ?

Je vous ai dit que j'en ai déjà deux (rire).